En dehors de son pays le consommateur ne peut utiliser le réseau de son opérateur – qui n’est plus accessible – et téléphone à travers celui d’un opérateur étranger avec lequel son opérateur a passé un accord dit d’itinérance, ou de roaming . Mais bien entendu ce service, qui mobilise deux réseaux et nécessite quelques dispositifs techniques est payant.
Les régulateurs des différents pays ont mis en évidence que les opérateurs européens n’en avaient pas baissé le prix aussi vite que le progrès technique le permettrait. Au contraire ils en avaient fait une source de revenus significative en conservant des tarifs très élevés. Comme le consommateur qui veut téléphoner à l’étranger est captif du roaming de son opérateur il le paie très cher : la seule autre solution – souscrire un contrat temporaire avec un opérateur local – n’est ni vraiment pratique ni même économique pour quelques appels. Exemple typique de limite du jeu de la concurrence pour des prestations annexes.
Dès 2007 le Parlement européen a pris les choses en main et imposé aux opérateurs des plafonds tarifaires qui, au fil des années, ne cessent de baisser. Lors de la prochaine étape , en avril 2016, les touristes partis dans un autre pays de l’Union européenne que le leur verront le surcoût des appels ( « la terminaison d’appel » ) chuter de 21 centimes à 5 centimes d’euro la minute. De la même façon, il n’en coûtera que 2 centimes au plus par texto, et la connexion sur internet vaudra 5 centimes par mégaoctet.
Encore mieux. Les députés ont décidé qu’en juillet 2017, ces surcharges disparaîtront complètement. L’Europe sera une réalité concrète, au moins pour les touristes surfant sur leur smartphone.
Mais voilà les réseaux de téléphonie mobile sont vraiment nationaux. Et les pays sont plus ou moins grands, plus ou moins denses, plus ou moins bien équipés et plus ou moins ouverts à la concurrence. Ce qui fait que les tarifs de téléphonie mobile y sont sensiblement différents, comme le savent fort bien les frontaliers.
Sans roaming les consommateurs seront donc tentés de retenir l’opérateur le moins cher en Europe, même pour leur usage domestique. Par exemple, un Belge aura intérêt à choisir un opérateur français, bien moins cher. Les forfaits à prix très réduit de Free pourraient devenir de véritables aubaines pour qui voudrait appeler 2 h par mois en Grèce depuis la Suède.
Ce qui n’a pas échappé au législateur européen qui, conscient de sa responsabilité et soucieux de ne pas déstabiliser le secteur, a donc décidé que la gratuité du roaming serait encadrée par une règle de fair use empêchant une utilisation anormale du forfait. Pas question qu’un consommateur puisse utiliser trop régulièrement son téléphone sur un autre réseau par rapport à ce qu’il consomme en moyenne avec son opérateur : sinon il y aura encore des frais. De même si un opérateur ne parvient pas à équilibrer ses comptes entre ce qu’il facture aux opérateurs étrangers et ce qu’il se fait facturer pour ses propres clients à l’étranger, il pourra continuer d’appliquer des frais.
Pour rendre simple et transparent l’usage de leur smartphone aux touristes à travers l’Europe, il ne s’agit donc que de restreindre la liberté du consommateur qui devra justifier qu’il est bien résident du pays où il voudra souscrire un abonnement
Et comme les 2 euros perçus par Free pour ses abonnements ne couvrent même pas le coût réel des terminaisons d’appel, il est probable que ne pouvant les garder sous leur forme nationale Free les augmentera. Mais ils permettront d’appeler au Portugal et en Finlande. Voilà qui réconfortera les nombreux parents qui souscrivent ces abonnements pour leurs jeunes enfants.