Cochon qui s’en dédit !

cochon qui rit

Fin juin devant l’effondrement du prix de porc et les doléances violemment exprimées des éleveurs le ministre de l’agriculture, avait trouvé la solution. Du bon sens : le prix est trop faible qu’on l’augmente !

Réunis au ministère les acteurs de la filière porcine et la grande distribution, toujours suspectée de spolier les producteurs, étaient enjoints de s’ engager sur le prix de 1,40 €/kg devant permettre la juste rémunération de tous les producteurs

Et ça marchait  : dès la mi- juillet le cours du porc sur le marché au cadran de Plérin (Côtes-d’Armor) – marché qui traite 60 000 porcs par semaine, 20 % de la production porcine française, et sert de référence pour le pays entier – qui se traînait en mai autour de 1,25 €/kg dépassait l’objectif .

Mais voilà : à la mi-août les deux premier transformateurs de viande porcine français la Cooperl  et  Bigard décident de de ne plus s’approvisionner à Plérin. Trop cher, disent-ils.

Exportant 35 % de sa production la Cooperl constate que le cours y est est 30 centimes plus élevé que le cours allemand et  qu’elle « augmente ses pertes à chaque fois qu’elle achète » sur le marché de Plérin.

Pourtant un marché au cadran, c’est une salle des ventes où le prix est fixé par une confrontation directe entre l’offre et la demande par un système d’enchères dégressives. Comment un acheteur peut-il payer un lot de porcs plus cher qu’il ne le souhaite. C’est bien lui qui  presse un bouton pour donner son  prix. Le vendeur concerné  peut juste accepter ou refuser l’offre de prix.

Oui, mais… non.

Le Marché du porc breton est une association contrôlée par 11 groupements de producteurs de porcs représentant 2 200 éleveurs de l’Ouest. En face 13 acheteurs – des abattoirs – y sont enregistrés. Son fonctionnement est réglé par une convention « privilégiant les vendeurs et acheteurs réguliers » qui prévoit un lissage des baisses et des hausses de prix et des engagements d’apports et d’achats. Avec une disposition bien particulière : lorsque des lots ne trouvent pas preneurs les acheteurs sont susceptibles de se les voir « affecter » d’office, selon des quotas fonctions de leurs achats passés, non pas aux prix qu’ils ont chacun acceptés, mais au prix moyen final.

Le premier acheteur de Plérin – 20 000 porcs par semaine environ – est une filiale de Leclerc qui lorsqu’elle achète au prix souhaité par le ministre est assurée d’un débouché auprès de sa maison mère.

Mais nos deux acheteurs, qui jusqu’alors représentaient ensemble 25 % des achats de Plérin, sont moins enclins à se voir imposer des achats à des prix qui ne sont pas les leurs. D’autant plus que le cours fixé à Plérin concerne bien plus que leurs achats sur ce marché. Ainsi la Cooperl, qui achète chaque semaine 120 000 porcs vivants, ne s’approvisionnait que pour moins de 10 % à Plérin : en tant que coopérative regroupant 2 700 éleveurs elle privilégiait l’achat en direct à ses adhérents ; mais elle leur payait jusqu’alors le même prix. Il ne leur restait qu’à quitter le marché de Plérin et réduire ainsi leurs quotas.

Michel-Edouard Leclerc a beau déclarer « Je ne sais pas jusqu’où le marché de Plérin est central.  » il reconnaissait qu‘ »A la table ronde chez Stéphane Le Foll, les professionnels et les syndicats nous ont demandé d’y soutenir les cours par nos achats. » 

Le ministre encourageant un soutien artificiel – pour ne pas dire une manipulation – des cours ?Impossible.

Le site de l’Autorité de la Concurrence le rappelle bien «  »Le principe élémentaire en droit de la concurrence est que chaque producteur conserve sa liberté pour déterminer ses prix. Le code de commerce prohibe donc les accords sur les prix entre producteurs indépendants qui ne sont constitués ni en coopératives ni en entreprises uniques. » 

De telles initiatives seraient illégales, et de plus inutiles : » un accord sur les prix est inefficace dans un marché intégré comme l’est le marché européen. En effet, rien n’interdit aux acheteurs (transformateurs, distributeurs) de mettre en concurrence les produits agricoles français avec ceux de nos voisins européens et de les importer si ces derniers sont plus compétitifs ».

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