En juin, 2008 le Conseil de surveillance du Grand Port Maritime du Havre décidait de s’engager dans la réalisation d’un terminal multimodal unique en France.
Les opérateurs de transport combiné, qui acheminent les conteneurs débarqués au port,se montraient impatients de voir le projet lancé et d’y participer. « Le Havre, port majeur et porte d’entrée sur le Grand Paris, devait se doter d’un système d’optimisation du traitement de ses conteneurs. Le terminal multimodal, que nous partagerons avec des acteurs de qualité du transport combiné, est un outil industriel haut de gamme, élément majeur dans l’offre massifiée » déclarait le premier d’entre eux tandis que ses collègues renchérissaient : «nous avons besoin d’un système structuré et efficace nous permettant de traiter les conteneurs qui transitent par le port du Havre et notamment par Port 2000 : la plateforme havraise, avec ses deux postes fluviaux dédiés, nous offre la possibilité d’opérer ensemble sur un terminal multimodal et donc de développer plus largement des solutions alternatives au tout routier» « Un lieu de massification tel que la plateforme multimodale havraise, qui allie les différents modes, participe à pérenniser la confiance des clients et donc à augmenter les volumes traités » .
L’objectif était de « massifier » les flux de conteneurs originaires des différents terminaux du port en les concentrant sur une plate-forme où peuvent être chargés camions, trains et barges fluviales, au bénéfice de tous les opérateurs. Soit un site de 65 ha, comprenant deux postes à quai fluviaux de 200 mètres, une zone de stockage et une cour ferroviaire équipée de huit voies ainsi qu’un faisceau de soutien électrifié pouvant traiter des trains ultra-longs de 1 500 mètres, dotée de 4 portiques géants de 300 t.
Ce projet de 140 Millions d’euros devait être capable de traiter annuellement 300.000 conteneurs et être un « véritable site industriel de création de valeur ajoutée ». Enfin, last but not least, décidé dans la foulée du Grenelle de l’environnement, cet équipement devait permettre d’économiser 500 000 t de CO2 chaque année.
Un montage original choisi après concours confiait à LH2 une société ad hoc le soin de construire puis louer la plate-forme à une société d’exploitation LHTE. Et pour sécuriser ce montage les actionnaires de LHTE n’étaient autres que les principaux opérateurs allant utiliser utilisant ce terminal, actionnaire-utilisateurs qui s’engageaient de plus sur un niveau de chiffre d’affaires garanti, indépendamment du trafic réellement amené, à même de couvrir les loyers dus par LHTE à LH2T.
A vrai dire ils ne finançaient ainsi qu’un peu moins de 20 % du projet, 113 millions d’euros étant apportés par le Grand Port du Havre ou des collectivités publiques.
Le coût du projet a été tenu, même si quelques difficultés ont conduit à reporter la livraison initialement prévue pour 2013. Ce n’est qu’en juin 2015 que LHTE a pris la gestion d’un outil flambant neuf.
Las le 23 octobre 2015 LHTE était mis en redressement judiciaire. Le terminal ne fonctionne pas et il est incapable de payer ses loyers. Deux raisons : le réseau informatique toujours pas au point et un conflit avec le syndicat CGT des dockers du port qui revendique le statut de docker pour les employés de LHTE.
Début 2016 le terminal attend toujours son premier conteneur.
Et pendant ce temps on apprend que le port d’Anvers change de statut. D’entreprise municipale il devient société anonyme, propriété de la ville à 100 %. En 2016 celle-ci percevra 21 millions d’euros de dividendes. Ce changement est officiellement motivé par « la volonté d’appuyer les décisions relatives au port sur une expertise de professionnels et de les dissocier d’enjeux politiques ».