Le 28 juillet 1951 l’ONU adopte la convention de Genève relative aux réfugiés. Désormais une personne craignant « avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. » a droit à l’asile. Et après le protocole de New-York qui en 1967 supprime dans la convention toute restriction temporelle et géographique, toute personne fuyant son pays peut obtenir l’asile dans n’importe quel pays signataire.
Principe empreint d’une grande générosité.
Pour l’application duquel les Etats ont pris leurs dispositions.
Certes ils accordent à tout demandeur arrivant sur leur sol le droit de déposer une demande d’asile et s’engagent à lui accorder le statut de réfugié si, après examen, ils considèrent qu’il en relève bien. Mais il n’est jamais facile de renvoyer dans son pays d’origine un demandeur débouté. Et même acceptés les réfugiés peuvent être une charge économique pour la collectivité. Alors les Etats veillent à recevoir le moins possible de demandes.
Pour cela ils ont édicté des règles punissant de lourdes pénalités et amendes tout transporteur international faisant débarquer sur leur sol un voyageur ne disposant pas de visa et qui ne serait pas reconnu réfugié par la suite. Devant cette menace c’est le transporteur qui interdit l’embarquement du candidat à l’asile ; pas d’embarquement, pas de débarquement et pas de dossier à instruire. Certes le candidat à l’asile peut espérer obtenir un visa humanitaire du pays qu’il souhaite rejoindre. Mais ces visas sont délivrés discrétionnairement. S‘il n’en a pas le candidat à l’exil doit se résoudre à franchir illégalement les frontières par ses propres moyens pour accéder au pays dans lequel il souhaite formuler sa demande.
Régulation par le coût et le risque de l’exil.
Non assumée mais bien réelle.
Dans l’Union européenne et pour éviter qu’un candidat à l’asile débouté dans un pays ne profite de la facilité de circulation entre pays propre à la zone Schengen pour errer de pays en pays sous prétexte de formuler une nouvelle demande, les Etats ont convenu qu’une seule demande serait recevable. Le candidat doit la déposer dans le premier pays européen où il a débarqué.
Mais avec l’embrasement des guerres civiles en Afrique et au Moyen-Orient, conséquences directes parfois d’interventions occidentales aux effets mal anticipés, le nombre de réfugiés a explosé. Syriens, Afghans, Erythréens, etc sont des millions à fuir leur pays et à vouloir trouver refuge en Europe.
Et malgré les risques des traversées illégales organisées par des passeurs sur des navires surchargés ils se pressent aux portes de l’Italie et de la Grèce, les deux pays les moins difficilement accessibles. Et dont les gouvernements se sont retrouvés débordés par des flux de migrants bien supérieurs à leurs capacités d’accueil. Rapidement le gouvernement grec a choisi de fermer les yeux sur le flux de migrants traversant la Grèce vers la Macédoine et le nord de l’Europe, normalement interdit. Au contraire il l’a encouragé, pour ne pas avoir à supporter seul la charge de leur hébergement, avant que les pays européens se mettent plus ou moins d’accord et très difficilement pour organiser l’évacuation de ces réfugiés débarquant en Grèce vers des pays acceptant de les accueillir, essentiellement en Europe du Nord.
Pour traiter le problème, les pays de l’Union n’ont pas choisi d’offrir des visas humanitaires à ces millions de réfugiés. Non, malgré les grands principes des accords internationaux, chacun des dirigeants européens est plus ou moins convaincu que ses concitoyens ne sauraient accepter une brusque arrivée de 1 % de population supplémentaire, de langue et de culture différentes. D’autant plus que cet accueil s’accompagnerait, au moins au départ, de dépenses de solidarité très importantes, susceptibles d’impacter le niveau de vie de tous les citoyens, qui ne seraient pas prêts à l’accepter. A vrai dire jamais la question ne leur a été posée clairement.
Finalement les dirigeants européens ont convenu d’une autre solution : sous-traiter la gestion du problème à la Turquie. Moyennant quelques milliards d’euros versés par les pays européens la Turquie accueillera les migrants qui lui seront renvoyés par la Grèce, bien entendu selon les règles de la convention de Genève. Le cas échéant le gouvernement turc les renverra vers leur pays d’origine. Mais avec ses méthodes et ses procédures, souvent dénoncées par les même pays européens pour leur brutalité. Mais si efficaces.
Au mois d’avril le pape François s’est rendu en Grèce sur l’ïle de Lesbos, là où débarquent ces migrants qui désormais seront refoulés vers la Turquie. Emu de la situation il a solennellement demandé « à tous les pays », tant que dure « la situation de nécessité » « d’étendre l’asile temporaire » et d’octroyer « le statut de réfugié à ceux qui sont éligibles ».
Et prêchant par l’exemple il a ramené au Vatican, dans son avion, douze réfugiés syriens. Trois familles de quatre personnes sélectionnées parmi 20 000 personnes attendant dans les camps de l’île.
Interrogées sur leur processus de sélection les autorités les autorités vaticanes ont expliqué ; elles souhaitaient aider des familles. Mais soucieuses de ne pas interférer avec l’accord Turquie-Union Européenne, elles ne souhaitaient aider que des migrants disposant de papiers d’identité en règle et ne devant pas être renvoyés en Turquie. Et dès lors qu’elle s’intéressaient à des migrants dans « des conditions particulièrement vulnérables » le choix des trois familles s’était imposé de lui-même.
Des critères très administratifs pour accorder un visa humanitaire.
Manifestation propre à la charité chrétienne ou reconnaissance par un état souverain des contraintes de la real politik ?